Troisième volet du cycle de conférences « Construire les territoires de demain », la question « Tout change, tout évolue… sauf l’architecture ? », en s’emparant du futur des villes, a suscité le débat à la Maison de l’architecture en Île-de-France. Retour sur une conférence placée sous le signe de l’avenir et de l’humanité.
LES INTERVENANTS
• Comment créer la ville (de) demain ?
Sybil Cosnard, présidente et fondatrice de City Linked
• Défis environnementaux et nouveaux usages : quand la construction réinvente l’avenir
Florence Bannier, ingénieure veille et Innovation, CTICM
• Faire ici et maintenant pour demain
Julien Callot, chef de projet, Lacaton & Vassal
• PMU ou le Pour Muter l’Urbanisme
Vincent Parreira, architecte, fondateur de l’agence AAVP Architecture
• Le projet Detroit.maj : une nouvelle forme d’urbanité pour la ville
Julien Desbat et Julien Picard, ENSA Nantes, Premiers Prix du Concours Acier 2019 « Une structure d’accueil en 2 temps, 3 mouvements »
« Comment créer la ville de demain ? », s’interroge Sybil Cosnard. Difficile à anticiper… Entre visions utopistes et retour aux villes nouvelles qui ont montré toutes leurs limites, le sujet reste peu évident pour les urbanistes. Le parti à prendre est alors celui d’identifier les grandes tendances dans les pratiques du quotidien. Premier enseignement : le big data arrive en ville. La data city, c’est demain pour Toronto avec de nouveaux opérateurs urbains dont Sidewalk Labs, une filiale du géant américain Google.
Mais lorsque la conception s’effectue par les datas, que peuvent faire les architectes ? Et Sybil Cosnard de souligner le risque commun d’uberisation pour les acteurs de l’urbain. Si, demain, la ville est plus mixte et un même bâtiment intègre différents programmes (tertiaires, résidentiels, culturels, sportifs, d’agriculture urbaine…), celle-ci parviendra-t-elle à devenir sociale au service du vivre-ensemble ? Autre tendance d’aujourd’hui : la ville frugale sera la ville rénovée avec, pour le Grand Paris d’ici à 2050, quelque 30 % du parc de bâtiments respectant la RT 2012.
Rénovée, elle sera également concertée et préfigurée. Enfin, la ville de demain se bâtira sur des terrains d’un nouveau genre. Le but : revitaliser le cœur des villes, lutter contre l’étalement urbain et réinventer le foncier. Comment, alors, l’acier, ses concepteurs et ses constructeurs peuvent-ils œuvrer dans ces directions ? Consciente des enjeux et porteuse de solutions, la filière acier construction prend toute sa part dans l’édification de la ville de demain, a rappelé Florence Bannier.
Pionnière dans l’utilisation du numérique, cette ingénieure Veille et Innovation multiplie les outils pour faciliter la prescription et la traçabilité des données pour le réemploi. En construction neuve, la filière mise sur la flexibilité des ouvrages, à l’image de celle de l’immeuble Lot O7 réalisé par l’agence ChartierDalix, et sur le bâtiment réversible et modulable. Soulignant la mixité nécessaire entre tous les matériaux, Florence Bannier a exposé le rôle majeur de l’utilisation de l’acier dans la rénovation, les surélévations, la sécurité incendie et le thermique, tout en démontrant son incontestable et incontournable présence dans le patrimoine d’hier et de demain.
Selon Julien Callot, il ne suffit pas tant de penser au futur des villes que de « faire ici et maintenant pour demain ». Obligation est faite, aujourd’hui, de changer de paradigme et de poser la question du présent. À ses yeux, « le bâtiment le plus durable est celui auquel on a redonné vie ». S’appuyant sur les projets de l’immeuble La Chesnaie à Saint-Nazaire et du Grand Parc à Bordeaux, réhabilités par l’agence Lacaton & Vassal, l’architecte observe que la réhabilitation est une capacité de construction. Systèmes constructifs à ossature métallique permettant flexibilité, facilités et économie, extension, augmentation de la surface, logement sur le toit, énergie passive… toutes les solutions doivent être mises en œuvre pour se tenir à un principe fondamental : ne jamais démolir. Extensions, réhabilitations ou constructions neuves, Vincent Parreira, architecte de l’agence AAVP, tient, quant à lui, à intégrer la question sociale à la ville du futur.
Quelle est la place de l’humain ? Il est, en effet, plus que jamais, impératif de retrouver des lieux de sociabilité, une permission de muter l’urbanisme (PMU), du hall d’entrée d’un immeuble au centre commercial. Réparer la ville d’hier pour humaniser celle d’aujourd’hui, c’est également le projet de Julien Desbat et de Julien Picard, étudiants à l’ENSA (École nationale supérieure d’architecture) de Nantes, qui, avec leur projet Detroit.maj, ont remporté le premier prix du Concours Acier 2019 sur le sujet « Une structure d’accueil en 2 temps, 3 mouvements »