RÉNOVATION DE POLYGONE, MONTPELLIER
Nef gonflée pour vaisseau commercial
Motivée par sa remise aux normes complète, la rénovation de Polygone, inauguré en 1975 aux abords de la place de la Comédie, mue ce centre commercial introverti en une lumineuse galerie marchande contemporaine. Cette urbanité « éclairée » insufflée par Jean-Paul Viguier résulte de la greffe d’une ingénieuse verrière de 120 m de longueur.
PREMIER CENTRE COMMERCIAL DE CŒUR DE VILLE
En 1970, le maire de Montpellier décide de créer un nouveau centre-ville à l’emplacement d’une gare et d’un vaste champ de tir désaffectés aux confins de la place de la Comédie.
Y sont programmés le futur hôtel de ville, des logements et des bureaux dont des tours, mais aussi le premier centre commercial en cœur de ville, allant ainsi à contre-courant des trois premiers centres commerciaux de périphérie ouverts quelques mois plus tôt en France. Cité bâtie sur une colline, Polygone, inauguré en 1975, met à profit les 14 m d’aplomb pour développer quatre niveaux de parking sous deux niveaux de commerces dont seul le niveau supérieur émerge du côté Écusson, la surélévation de 1996 y ajoutant un étage. En 1983, Georges Frêche met en œuvre, dans son prolongement, Antigone, immense quartier à l’architecture néoclassique signée Ricardo Bofill. Ce dernier adosse au fronton quasi aveugle de Polygone un grandiloquent immeuble de bureaux en terrasses et arcades, Les Échelles de la Ville, magnifiant les escaliers reliant les deux parties de la commune.
UN NOUVEAU SOUFFLE
L’institution connaît une baisse de régime depuis l’avènement en 2009 de son concurrent Odysseum implanté à Port-Marianne et desservi par le tram. Pour y remédier, la Socri, son propriétaire originel, décide, en 2015, de lui insuffler un air neuf. Elle sélectionne Jean-Paul Viguier, auteur de Confluence à Lyon et de Muse à Metz. Seul impératif : l’activité commerciale devra continuer durant le chantier ! Si une remise aux normes (sécurité, accessibilité, signalétique) s’impose, Polygone, plutôt introverti, aspire à davantage de fluidité, de luminosité naturelle, bref, d’urbanité.
En écho aux verrières des galeries marchandes du 19e siècle, l’architecte substitue à ses modestes coupoles et puits de lumière très eighties une généreuse nef contemporaine que ses variations de hauteur font onduler jusqu’à 13 m au-dessus du sol ! La recherche de points porteurs couplée à une optimisation structurelle l’incite à l’élargir en la faisant déborder de part et d’autre de la galerie tout en la surélevant. La lumière du jour y sera plus généreuse, et la ventilation naturelle et le désenfumage seront améliorés via ses retombées latérales avec ouvrants et des terrasses intérieures plantées de pins. Constituée d’arcs surbaissés croisés en losange réalisés en tubes d’acier de 24 cm de section, la voûte emprunte des allures Renaissance, chaque trame étant différente. Fabriquée par l’usine Eiffage Métal de Fos-sur-Mer, elle a été découpée en cinq tronçons transportés par barges et convois exceptionnels sur site, puis mise en œuvre sur un pont roulant à la façon d’un tablier de pont. Dix fois plus légers qu’un vitrage, des coussins en ETFE ont été spécifiquement étudiés pour résister au puissant vent local, aux variations d’ensoleillement (pixellisation de 30 à 70 % selon l’orientation) et aux éventuelles poches d’eau (ayant fait l’objet d’une Atex). La couverture une fois opérationnelle, les anciennes poutres-treillis ayant supporté le platelage de protection ont été déposées. La hauteur des devantures des magasins situés dessous a ainsi pu être portée à 7 m. Le porte-à-faux de 7 m engendré par le recul de l’accès principal du côté place de la Comédie abrite une conviviale terrasse en belvédère. Les façades ouest se parent dorénavant d’un bardage métallique perforé et thermolaqué de couleur sable.
- Maître d’ouvrage : groupe Elancia (ex-groupe Socri)
- Maître d’œuvre : Viguier Architecture Urbanisme Paysage
- BET verrière : Arcora Entreprises : Eiffage Métal, IASO (ETFE)