Réhabilitation de la caserne de Lourcine, Paris

Métamorphose

Autrefois en déshérence, la place d’armes métamorphosée. Photo : Sergio Grazia
L’acier autopatinable : une matérialité chaude, vibrante et changeante. Photo : Sergio Grazia

En gardant pour mieux la révéler toute la puissance du lieu, l’opération de réhabilitation et de réaménagement de la caserne de Lourcine dans le 13e arrondissement de Paris, conduite par l’agence ChartierDalix, est exemplaire.
Un projet ambitieux dont l’acier autopatinable incarne le nouveau visage.

Radical, le changement de programme et d’occupation de la caserne de Lourcine l’est assurément. Mais cette opération de réhabilitation, aussi ambitieuse et innovante soit-elle, n’en demeure pas moins d’une finesse et d’une justesse remarquables. Que l’on en juge plutôt. Un des plus anciens sites militaires parisiens, poste avancé de la défense de Paris dès le Moyen Âge, situé au cœur d’un ensemble très urbanisé, s’est littéralement métamor­phosé en authentique paysage arboré qui vient s’inscrire aujourd’hui comme un élément régénérateur de la ville, capable d’insuffler une nouvelle dynamique au quartier.
L’opération de reconversion du patrimoine concernait, d’une part, la restructuration des deux bâtiments du 19e siècle pour y installer une partie de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (locaux d’enseignement, de recher­che, bibliothèque et reprographie), d’autre part, la création d’un grand amphithéâtre dans l’emprise d’une partie du parking souterrain d’un troisième bâtiment. Le parti des architectes : préserver un patrimoine précieux en y touchant le moins possible tout en l’adaptant à ses nouvelles fonctions.

Photo : Sergio Grazia
Photo : Takuji Shimmura
Photo : Sergio Grazia
Un escalier tournant monumental en acier marque l’entrée de la bibliothèque au niveau du rez-de-jardin comme au niveau du rez-de-chaussée jusqu’au R + 1. Photo : Takuji Shimmura
Un escalier tournant monumental en acier marque l’entrée de la bibliothèque au niveau du rez-de-jardin comme au niveau du rez-de-chaussée jusqu’au R + 1. Photo : Takuji Shimmura

LIBÉRATION TOTALE DES ESPACES

Travailler par couches successives, garder le plus de choses possible par simples touches : l’intervention particulièrement ciblée vise à retirer les ajouts accumulés au fil du temps et dénaturant l’espace et les volumes d’origine. L’enveloppe n’est pratiquement pas modifiée, et les qualités de l’existant sont magnifiées par une libération totale des espaces. Avec la suppression des cloisons et des faux-plafonds, les façades intérieures sont révélées par des circulations généreuses, tandis que la hauteur est valorisée par des trémies dévoilant la technique. Une simple application de flocage en sous-face des voutains en brique rendus visibles assure une protection acoustique et coupe-feu. Monumental, un escalier tournant en acier marque l’entrée de la bibliothèque au rez-de jardin et se déroule sur trois niveaux pour donner accès à celle-ci.

MÉTAL ET VÉGÉTAL

Mais c’est bien la réappropriation de la place d’armes qui confère au projet sa dimension remarquable. Auparavant laissé quelque peu en déshérence, pas vraiment entretenu et envahi par des voitures en stationnement, le lieu s’est littéralement métamorphosé. Pas question, en effet, d’implanter l’amphithéâtre de la future université dans la caserne proprement dite. L’agence a donc retravaillé toute la topographie du lieu par plissement de sol ou inflexion douce et transformé cet espace le plus symbolique de la caserne en esplanade paysagère. La place d’armes a ainsi été creusée pour accueillir le nouvel amphithéâtre de quelque 500 places et un hall d’accueil, tapi en cuvette sous la végétation. Tous les arbres ont été conservés, et trois escaliers extérieurs en pente douce conduisent de manière naturelle à l’entrée. Ces escaliers, de même que le sol du parvis, la façade et les parois du hall ainsi que l’accès à l’amphithéâtre sont en acier autopatinable. Avec sa matérialité chaude, vibrante et changeante, il accompagne le visiteur sur tous les espaces d’accueil extérieurs en se prolongeant jusqu’à l’intérieur. En s’inclinant en parvis paysagé qui met en valeur le nouvel accès à la galerie et à l’amphithéâtre, il confère à la place d’armes toute sa fonction fédératrice et symbolique.


Maîtrise d’ouvrage : 
Epaurif pour l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Architectes : ChartierDalix

Axonométrie. Doc. : ChartierDalix
Coupe longitudinale. Doc. : ChartierDalix