RE 2020 ET ÉVOLUTION DES SEUILS EN 2025 : DE NOUVELLES RÈGLES VERTUEUSES PLUS EXIGEANTES

En matière de développement durable, les nouvelles constructions doivent, depuis 2022, respecter les préceptes de la RE2020, et favoriser la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation des énergies fossiles ainsi que l’efficacité énergétique et le déploiement d’énergies renouvelables. C’est ce à quoi s’attellent, déjà quelque temps déjà, la filière acier construction très impliquée, et bon nombre d’autres industriels du secteur du BTP ainsi que les acteurs de la construction.

Repenser les modes constructifs dans le sens d’une mixité intelligente amène à repenser de façon globale les bâtiments, en termes de fonctions et d’adaptabilité. La mixité de matériaux -qui ne date pas d’aujourd’hui et concerne aussi bien les bâtiments anciens que nouveaux- porte sur la structure de l’ouvrage et son enveloppe qui font l’objet de nombreuses recherches tant architecturales que techniques, le noyau béton assurant le contreventement et le coupe-feu nécessaires. Associer l’acier à du bois, du béton, de la pierre, de la brique ou du verre, permet de poser chaque matériau à sa juste place et selon ses particularités, en vue de réduire l’empreinte carbone de chaque édifice et les consommations d’énergie. Chaque matériau mis en œuvre est optimisé, lorsqu’il est utilisé de manière rationnelle, et dans une perspective de réduction des délais de chantier et de performance économique, en laissant libre cours à la création architecturale. Les solutions techniques innovantes déployées doivent être plus durables et maîtrisées pour répondre aux réglementations thermique, acoustique, incendie et sismique en vigueur. La construction métallique occupe une place de premier ordre pour son aptitude à mettre en œuvre des processus structurels et industriels, flexibles et évolutifs, adaptés à chaque édifice, les acteurs de la filière acier étant depuis longtemps engagés dans la voie du développement durable.

ATTEINDRE L’OBJECTIF DE LA NEUTRALITÉ CARBONE EN 2050

Si la RE2020 s’inscrit dans les objectifs de transition énergétique de la France et la lutte contre le changement climatique, les nouveaux seuils entrant en vigueur en 2025 de la RE 2020 sont plus strictes, avec des seuils abaissés pour l’impact carbone et des exigences renforcées, en termes de performance énergétique. Les professionnels de la construction doivent s’impliquer fortement pour gérer ces changements importants et les intégrer dans leur démarche qui varie d’un corps de métier à l’autre. Pour les maîtres d’œuvre et d’ouvrage, ils doivent concevoir des édifices respectant les nouveaux seuils de performance énergétique, et y intégrer des techniques innovantes et des matériaux écologiques. Les bureaux d’études doivent, eux, développer des méthodes d’analyse de cycle de vie adaptées aux nouveaux critères d’exigence et fournir des données précises sur l’impact environnemental des projets. Sachant que la RE 2020, avec son évolution dans le temps en terme de seuils, représente une réelle opportunité pour les acteurs de la construction, celle de se réinventer et contribuer activement à la transition écologique, en créant de nouvelles pratiques plus vertueuses. Surtout que l’objectif visé, en adéquation avec les engagements internationaux pris par l’Hexagone, est la neutralité carbone à l’horizon de 2050, impliquant de réduire les GES. Un vrai défi pour le secteur de la construction qui doit désormais mesurer l’impact environnemental de chaque édifice et des divers matériaux mis en œuvre, en s’appuyant sur l’analyse du cycle de vie (ACV) de ces derniers. Si chaque matériau possède des spécificités, l’acier reste pionnier pour ses nombreux atouts.

La Fondation Louis Vuitton, Paris 16e, Frank Gehry architecte, 2020. La charpente aérienne et de forme complexe du musée comporte douze voiles de verre bâties en composants d’acier et de bois savamment entremêlés. Photo : Carol Maillard
Le Phare, Chambéry, agence d’architecture Patriarche, 2009. Le déambulatoire très lumineux, qui ceinture la salle de spectacles, associe une charpente en acier à des panneaux de verre et une structure en béton. Photo : Patriarche

PROJETS RE 2020 : DE LA CONCEPTION À LA RÉALISATION

L’application de la RE 2020 réside dans la préparation en amont du permis de construire, dès l’avant-projet. Le bureau d’études, en collaboration avec l’architecte, réalise une étude thermique et environnementale, se référant aux critères définis par la RE 2020. Lors du dépôt du PC, le maître d’ouvrage remplit l’attestation relative à la RE 2020 qui, si elle engage la responsabilité de ce dernier, prouve que la conception du bâtiment respecte les indicateurs Bbio et le confort d’été. Et avant la déclaration d’ouverture du chantier, le maître d’ouvrage avec le maître d’œuvre doivent être à même de justifier le respect de l’indicateur de la construction afin que le permis de construire soit délivré et que la phase de construction débute. Les travaux se déroulent alors, dans le respect des prescriptions techniques liées au cahier des charges, et en conformité avec l’étude technique et environnementale ainsi que les critères de performance attendus. Les travaux achevés, la conformité du chantier est assurée par un contrôle global effectué sur le bâtiment, suivi de la délivrance de la conformité des travaux dans le cadre de la RE 2020.

EMPREINTE CARBONE D’UN BÂTIMENT : LES FICHES FDES ET PEP DE RÉFÉRENCE

Dans la RE 2020, l’empreinte carbone de toute construction est calculée au moyen de l’Analyse du cycle de vie ou ACV, cette empreinte carbone étant mesurée, suivent quatre grandes étapes. La première a trait à l’extraction des matières premières et à la fabrication des matériaux et leur transport, et la seconde à leur mise en œuvre. Si la troisième phase porte sur l’exploitation de l’édifice, la dernière concerne sa fin de vie. Le calcul de l’impact carbone tient compte de plusieurs critères, tels que les émissions liées aux composants, aux énergies importées, à la phase chantier, aux consommations d’eau et à la parcelle. Les fabricants fournissent des documents, comme les FDES (Fiches de données environnementales et sanitaires) pour les matériaux et les fiches PEP pour les équipements techniques (informations sur l’impact environnemental d’un produit ou d’une catégorie de produit) qui servent de base de calcul. Ces fiches, qui traduisent les résultats de l’ACV d’un produit spécifique, sont accessibles sur le site de la base INIES. Si un produit de construction ne dispose pas d’une FDES ou d’une PEP, le calcul des l’indicateur considère des valeurs par défaut, fort pénalisantes. De plus, deux indicateurs, soumis à des seuils réglementaires, servent à mesurer les émissions de GES d’une construction. D’une part, l’IC construction qui évalue les émissions de GES des produits de construction et des équipements, et leur pose lors d’un chantier et d’autre part, l’IC énergie qui estime les émissions de GES des énergies consumées pendant l’exploitation de l’édifice. Le seuil maximum de ces indicateurs, pris en compte depuis 2022, évolue progressivement à la baisse à l’horizon 2025, puis en 2028 et en 2031, tout en étant pondéré, en fonction de la surface du bâtiment et de la zone géographique de son implantation.

Le stade Allianz Riviera, Nice, Jean-Michel Wilmotte architecte, 2013. Si la charpente mixte allie une résille en bois à des profils en acier, le volume global est enrobé d’une membrane translucide en ETFE. Photo : DR

PRIORITÉ À L’ACIER DÉCARBONÉ 

En complément de la nécessaire sobriété en terme d’usage des matériaux, il convient d’observer que l’acier n’est pas en reste, notamment pour ses capacités infinies de recyclage, face aux matériaux à base de bois collé  (le CLT par exemple) qui, brûlés ou transformés en panneaux de particules, sont gorgés de résine et de colle néfastes. D’où l’implication très forte, depuis quelques années, de la filière sidérurgique pour produire de « l’acier propre et vert » et décarboné. Certains pays, comme la Suède, ont été précurseurs, en investissant dans la recherche et la production d’acier décarboné, au moyen d’hydrogène. En France, ArcelorMittal y travaille de façon assidue, car si la sidérurgie représente à elle seule un quart des émissions de CO2, elle prévoit de réduire ses émissions de 35% sur ses sites en Europe et de 25% dans le monde, d’ici 2030. Cette industrie est en train de se réformer en profondeur pour arriver à produire de l’acier sans émettre de GES, d’ici 2050…Ce challenge à relever passe par une augmentation du recyclage de l’acier (issu des matériaux construction, etc.) pour le refondre dans le processus de production. Cela permet d’employer moins de matières premières, comme le fer et le charbon, et d’émettre moins de CO2, le but d’ArcelorMittal en France étant de produire un acier contenant 25% d’acier recyclé.

Aéroport Charles-de-Gaulle, Terminal 2 E, Roissy, Paul Andreu architecte, 2012. Surmonté d’une verrière, le long cylindre comprend 152 arcs en acier, auxquels est suspendue une voûte intérieure formée de lamelles de bouleau. Photo : Carol Maillard

LE HORS-SITE À L’HONNEUR

Si la construction sur site pose des enjeux en matière d’impact carbone, le mode de construction hors site a le vent en poupe pour ses multiples atouts. Elle est plus viable sur les plans économique et environnemental, elle permet une mise en œuvre plus rapide sur le chantier et génère un gain de temps certain, elle favorise le travail en plus petit nombre in situ par rapport à un chantier traditionnel et est moins émettrice en termes de carbone. Traditionnellement, l’acier a toute sa place dans la construction hors site, puisque ce matériau est léger, facilement transportable des ateliers de préfabrication au lieu d’assemblage des composants, sans être obligé d’utiliser un grand nombre de camions sur le chantier, ce qui entraîne une baisse des émissions de carbone. De plus, la préfabrication et standardisation des éléments constructifs, particulièrement en acier, destinée à développer un modèle de production industrielle, n’entrave en rien la création architecturale des bâtiments, tout au contraire, car elle favorise des expressions variées et diversifiées à l’infini. La conception des bâtiments repensée par les architectes favorise leur flexibilité et adaptabilité dans le temps, et s’accompagne d’une remise en cause des ossatures des édifices, où la technique des murs porteurs est revue et corrigée. Il s’agit plutôt de dissocier les éléments porteurs de ceux qui divisent les espaces. Là aussi l’acier joue un rôle essentiel, dans la mesure où les structures métalliques boulonnées peuvent être facilement assemblées selon les besoins évolutifs et fluctuants des usagers, puis démontées à tout moment sur place ou ailleurs.

GÉNÉRALISER LA MIXITÉ DE MATÉRIAUX

Mixer plusieurs matériaux (acier, bois, verre, béton…), aux caractéristiques différentes, contribue à optimiser les structure mises en œuvre et à encourager d’autres manières plus innovantes et performantes de construire les ouvrages à venir, à l’aide de systèmes constructifs variés. Et l’acier détient une place privilégiée pour sa capacité à produire en masse et à l’infini des composants légers et aisément combinables sur site, avec des matériaux complémentaires. De plus en plus d’architectes érigent des bâtiments à ossatures hybrides qui offrent une grande liberté conceptuelle et architecturale, avec des espaces intérieurs flexibles et évolutifs dans le temps. De multiples réalisations de ce type continuent à voir le jour, partout.

Archives nationales, Pierrefitte, Massimiliano Fuksas architecte, 2012. En termes de mixité de matériaux, les magasins de conservation ont été édifiés en béton et les satellites en structure acier et pans de verre. Photo : Carol Maillard