Extension d’une maison dans le Morvan

Quand l’acier « galvanise » une résidence secondaire

Au crépuscule d’un parcours prometteur, Minuit Architectes se passionne pour la menuiserie qu’elle soit en bois ou en métal. L’agence vient de rénover 120 m2 supplémentaires d’une ancienne longère nivernaise, partiellement reconvertie il y une vingtaine d’années en résidence secondaire. L’acier galvanisé marié à l’okoumé a su réveiller la belle endormie.

Du rural à l’architectural
À une quinzaine de kilomètres de Château-Chinon et d’Autun, les anciennes fermes de cette commune rurale du Morvan offrent de belles opportunités de maisons de vacances aux urbains épris de nature et de vieilles pierres. C’est ainsi que cette longiligne longère probablement XIXe entama il y a vingt ans sa mue résidentielle sous la houlette d’un jeune architecte qui en rénova un tiers – 160 m2 – tout en amorçant « à la manière d’un cadavre exquis » l’extension à venir via deux ouvertures pratiquées dans le mur mitoyen, momentanément rebouchées.
C’est donc cette grange qui vient de faire l’objet d’une restructuration confiée à l’agence parisienne Minuit Architectes créée en 2020 par Aliénor Bolelli, Félix Borel, Maxime Eon et Joseph Vincent.
D’environ 80 m2 au sol, sa belle hauteur sous toiture autorisait la création d’un véritable étage d’une superficie identique. Pourtant les concepteurs préconisent d’être un peu moins gourmand, le programme attendu – trois chambres dont une de type parentale à rez-de-chaussée et un salon-bibliothèque-espace de jeux – pouvant être développé sur 120 m2. La ferme médiane préfigurait parfaitement la frontière entre les coins (sé)jour et nuit.
Seule une généreuse baie surbaissée septentrionale donnait jusqu’alors accès et jour à cette vaste remise. Une ouverture identique à ossature aluminium lui fait désormais face côté sud dont les vantaux accordéon libèrent intégralement l’accès à la terrasse projetée dans son prolongement via deux bracons tridimensionnels en tubes ronds d’acier galvanisé. Les plateaux en caillebottis du petit escalier latéral – tout en acier galvanisé – permettant de descendre au jardin sont suspendus à des tiges métalliques lui conférant sa gracilité. Côté nord, l’obturation s’est voulue opaque : deux grands vantaux en acier galvanisé commandent l’entrée, l’un d’entre eux intègre une porte. Mais à la belle saison l’ensemble se débat vers l’extérieur pour jouir au mieux de la nature environnante et du grand air.

Matériaux bruts

Il importait aux architectes que les matériaux nécessaires à l’aménagement de cette extension puissent rester bruts une fois mis en œuvre comme avait coutume de le faire l’architecture rurale, très largement menuisée. Ce sont donc l’acier galvanisé et l’okoumé qui ont régi la conception de l’espace. Davantage connoté industriellement, le premier procure sa légèreté inaltérable aux éléments structurels auxquels il impose des assemblages mécaniques, plus aucune soudure sur place n’étant possible. Ainsi, l’ossature du plancher intermédiaire créé est-elle constituée de profilés en U adossés aux poutres transversales existantes dans lesquels s’insèrent des IPE, des rails électriques courant sous leur semelle. Des panneaux en tôle micro-perforée confèrent au plancher haut du hall-salon une transparence relative. De part et d’autre, un vide laissé au droit des parois de façade métamorphose l’étage en une large passerelle que sécurisent des grilles-garde-corps. Deux portes coulissantes en applique commande l’accès au séjour préexistant tandis que celle opposée menant à la chambre parentale est à galandage, s’escamotant à l’arrière de la cloison menuisée en bois exotique. Cette dernière est devancée par une bibliothèque dont les étagères elles aussi en okoumé reposent sur des cornières prenant en sandwich les doubles tiges fixées à une sorte d’étrier riveté aux semelles des U moisant à la charpente bois à entrait retroussé de l’étage.Une large baie vitrée panoramique dont le cadre bois fait office de banquette permet aux occupants de la chambre parentale du niveau bas de se réveiller face au paysage. Le lit s’adosse à un ensemble menuisé offrant des rangements tant côté chambre que côté salle d’eau qu’éclaire un longiligne vitrage. D’ingénieuses cornières métalliques insérées dans les joints tiennent lieu de chevets.

Si le sol du rez-de-chaussée est tout en béton poli, celui de l’étage est constitué d’un parquet sur bacs acier. On y accède par un escalier toujours en acier portant de dalle à dalle implanté dans la dernière travée nord d’où accéder (… dans deux décennies ?) à la troisième rénovation ! Un bloc sanitaires-penderies commande deux chambres éclairées par deux fenestrons. L’une des deux bénéficie d’une vue plongeante sur le hall. Ce chantier de quatorze mois démarré après des études réalisées durant les confinements illustre bien la place privilégiée que les quatre fondateurs de Minuit Architectes accordent à la menuiserie. Leurs premiers projets d’aménagement d’appartements dans la capitale s’y prêtaient à merveille. Les superficies trop fréquemment contraintes y imposent une certaine subtilité dans les agencements. L’agence ne manque pas de ressources ni d’ingéniosité en la matière… qu’elle soit bois ou métal. En charge du réaménagement des ateliers de l’école d’architecture de Versailles, leur mission mobilière initiale s’est élargie à un complexe travail infrastructurel optimisant l’ensemble des usages et des réseaux.

Faire entrer la lumière en ouvrant de larges portes et fenêtres, composées de différents systèmes techniques comme les portes pliantes s’ouvrant sur la terrasse suspendue ou la porte-cochère en acier galvanisé

• Maîtrise d’ouvrage privée
• Maîtrise d’œuvre : Minuit Architectes
• BET Structure + entreprise acier : Métallerie Grillot SAS