LA CONCEPTION VERTUEUSE DES OUVRAGES EN ACIER

Pérenniser, créer et faire évoluer l’architecture

Les acteurs de la filière acier-construction se sont engagés depuis longtemps dans la voie du développement durable afin d’apporter des réponses adaptées à cette nouvelle manière de bâtir, conscients que l’un des enjeux principaux consiste à réorienter l’économie mondiale vers un monde bas carbone, qui implique l’abandon progressif des énergies fossiles au profit des énergies renouvelables. Une réelle opportunité pour l’acier qui apparaît comme le matériau de prédilection, destiné à être employé de façon raisonnée dans la conception ou la rénovation de bâtiments selon une logique d’économie de ressources, de type économie circulaire, en plein essor. L’éco-construction permet également de maîtriser les impacts environnementaux en termes de chantier et de conception, en privilégiant l’économie locale. Les architectes qui développent des projets respectueux des sites d’implantation, créent par là-même des ouvrages divers et durables, où l’acier occupe une place prépondérante grâce à ses structures légères et ses enveloppes performantes.

RECYCLAGE ET RÉDUCTION DES DÉCHETS : UN DÉFI PERMANENT

Il n’est plus à démontrer que l’acier est recyclable à l’infini et à 100 % sans perdre ses qualités intrinsèques, ce qui en fait un matériau « permanent » unique, le béton ne pouvant être recyclé qu’une fois et le bois difficilement, à cause des colles et vernis qui l’imprègnent. Cette propriété contribue à la préservation des ressources naturelles, en évitant de trop puiser dans les réserves de minerai de fer. Utiliser de l’acier dans la construction réduit à presque zéro la quantité de déchets produits pendant la fabrication et la mise en œuvre des structures puisque les chutes sont immédiatement recyclées. L’intervention dans un édifice métallique pour désassembler une structure existante est, par ailleurs, assurée par la collecte et le tri des pièces. Grâce à la structuration de la filière de récupération et de valorisation, le recyclage de l’acier est en outre toujours effectif et peut même être assuré localement, à proximité des chantiers. Un exemple significatif en est le One World Trade Center édifié à New-York en 2014 par les architectes Skidmore, Owings & Merrill, là où s’élevaient les tours jumelles disparues en 2001. Cette tour triangulaire et élancée, qui culmine à 542 mètres de haut et compte 104 étages, est pourvue d’une structure robuste en poutrelles et plaques d’acier dont environ 90 % proviennent d’aciers recyclés dans la construction : une performance technologique!

UNE DURABILITÉ À TOUTE ÉPREUVE !

L’acier demeure le matériau de prédilection pour garantir une pérennité hors pair à tout édifice bâti, du fait de sa haute résistance aux éléments naturels (air, eau, vent, pluie) voire aux tempêtes, séismes, incendies ou attaques de parasites, à condition de le traiter et de l’entretenir. Résistant à la corrosion, via des traitements appropriés, il est particulièrement adapté à des projets durables de long terme. De nombreux ouvrages ont ainsi traversé le temps, telle la tour Eiffel, érigée en 1889 à Paris par l’ingénieur Gustave Eiffel, qui s’élève à 330 mètres de haut — un vrai défi pour l’époque. Sa charpente en fer puddlé doit toutefois être repeinte tous les sept ans pour assurer son esthétique et éviter sa corrosion. On retrouve une démarche similaire pour le pont suspendu du Golden Gate à San Francisco, long de 1 970 mètres, construit en 1933 par l’architecte J.B. Strauss. Afin de le protéger des effets dommageables du milieu marin ambiant, il est repeint régulièrement en orange international pour qu’il ne rouille pas et qu’il continue à illuminer le ciel californien.

PROTECTION SOLAIRE ET VÉGÉTALISATION DES PAROIS  

L’acier joue aussi un rôle important dans les dispositifs de gestion des apports solaires des façades vitrées, gestion essentielle pour éviter le recours à la ventilation mécanique et faire ainsi baisser la consommation d’énergie non renouvelable. C’est le rôle des pare-soleil en acier, à lames fixes ou orientables, horizontales ou verticales, ou en panneaux perforés et résilles métalliques, qui filtrent la lumière et la chaleur solaires. Les façades d’immeubles sont de plus en plus souvent équipées de systèmes de ce type qui, en outre, les animent et les enrichissent. D’architecture très contemporaine, l’unité de production médicale Sophysa, avec ses laboratoires et ses bureaux, a été bâtie à Besançon en 2007 par l’architecte Brigitte Métra. Elle affiche de longues façades parées de brise-soleil gris, horizontaux et ondulants en acier revêtu d’un alliage d’aluminium-zinc, qui s’inclinent en fonction de leur orientation. L’acier sert aussi de support esthétique à la végétalisation des parois, autre solution pour maintenir un confort thermique naturel et donc économe en énergie. La villa M, un hôtel multifonctionnel de sept étages, construit en 2022 par Triptyque Architecture, à Paris, affiche une façade en ossature acier visible qui intègre plusieurs espèces de plantes, la transformant en un jardin vertical qui l’embellit et fait écran à la pollution ambiante.

PRÉFABRICATION ET RAPIDITÉ D’EXÉCUTION : LES CLEFS DU CHANTIER VERT

Les systèmes constructifs en acier employés dans le bâtiment sont formés de composants industrialisés, préfabriqués en usine et livrables sur site, qui permettent d’accélérer et rationaliser la construction des ouvrages, en raison de leur légèreté et de leurs facilités de montage et d’assemblage. Ce gain de temps génère ainsi des économies substantielles. Abritant diverses fonctions, la tour Burj Khalifa, la plus haute du monde, avec ses 828 mètres et ses 163 étages, a été érigée en 2010 à Dubaï (Émirats arabes unis) par l’architecte Adrian Smith. Son ossature mixte, en grande partie en acier, a permis une construction rapide et efficace. Issu de la filière sèche, ce mode constructif performant réduit aussi les nuisances de chantier, par rapport aux riverains, en limitant les bruits, les poussières et les déchets et, plus généralement, l’impact environnemental du chantier.

FLEXIBILITÉ ET ÉVOLUTIVITÉ DANS LE TEMPS 

Grâce à leurs ossatures de type Meccano, à composants industrialisés ou réalisés sur mesure, les bâtiments tertiaires, industriels ou sportifs, notamment, sont évolutifs, car ils sont assemblables et transformables à tout moment, voire démontables. Cette flexibilité de l’acier est une donnée essentielle pour créer des projets aux designs inventifs. L’emblématique musée Guggenheim de Bilbao en Espagne, signé de l’architecte Frank O. Gehry (1997), en est la figure de proue avec son architecture déconstruite et sa structure en acier galvanisé à géométrie variable, revêtue de plaques de titane en écailles qui emballent l’ouvrage et le magnifient. L’édifice est d’ailleurs devenu une référence universelle en termes d’équipement culturel capable de dynamiser l’économie locale. Cette notion d’évolutivité peut aussi se rapporter aux extensions de bâtiments existants destinées à les agrandir et les valoriser sans les détruire. L’opération complexe de la Tour Silex² (tertiaire), à Lyon Part-Dieu, conçue par les agences MA Architectes et Arte Charpentier en 2021, a consisté à surélever la tour EDF (1977) de quatre étages en charpente métallique en greffant sur elle une tour neuve de 126 mètres de haut, bâtie entièrement en ossature acier. L’acier permet en effet de raccorder aisément toutes sortes de structures au bâti existant.

RÉHABILITER ET/OU RECONVERTIR LES ÉDIFICES : UN IMPÉRATIF ! 

La tendance actuelle et future consiste à réutiliser et réhabiliter un bâtiment existant, ancien ou contemporain, plutôt que le démolir. Il s’agit de le remodeler et le faire évoluer dans le temps afin qu’il puisse s’adapter aux usages et modes de vie mutants des occupants, jusqu’à la reconversion d’un ouvrage patrimonial qui, affecté à un autre usage, sera préservé. L’intervention peut être intégrale ou partielle. Pour lutter contre l’obsolescence programmée, la réversibilité des édifices est plus que jamais d’actualité, s’inscrivant dans une optique de développement durable prégnante. Donner une seconde vie à un ouvrage ancien suppose de réorganiser les espaces internes ainsi que ses structures souvent mixtes, où le métal domine. C’est le cas du Carreau du Temple à Paris 3e (1863) qui a été transformé en équipement culturel en 2014 par le Studio Milou Architecture, son ossature en métal d’époque ayant été restaurée finement. Si ses façades en métal et verre ont été refaites et sur-isolées, les pans sud des trois verrières créées de la halle, qui la baignent de lumière naturelle, ont été couverts de cellules photovoltaïques, productrices d’électricité. L’enveloppe d’un édifice peut être en effet améliorée par un traitement thermique et acoustique adapté des façades et/ou du toit. Pour la gare de Lyon à Paris (12e), datant de 1865, elle fut réhabilitée en 2011 par l’agence AREP. Les deux halles vitrées ajoutées dans les espaces d’attente les bonifient, par un apport notoire de lumière naturelle qui accroît le confort du lieu et réduit l’éclairage artificiel onéreux.

ACIER À FAIBLE EMPREINTE CARBONE, L’AVENIR EN MARCHE

La réduction de l’empreinte carbone étant devenue récurrente, les fabricants d’acier s’y attellent. Ils alimentent les hauts fourneaux en matières premières issues du recyclage et font appel aux énergies renouvelables. ArcelorMittal utilise ainsi des ferrailles en remplacement du charbon, teste des systèmes de captage du CO2 et l’utilisation de l’hydrogène. Ces technologies innovantes ont pour objectif de réduire de 35 % les émissions carbonées de l’acier d’ici à 2030 en Europe et d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. L’acier contribue déjà à la réalisation de projets de construction à faible empreinte carbone. Il en va ainsi du stade de football américain AT&T des Dallas Cowboys d’Arlington, au Texas. Érigé en 2009 par l’atelier d’architecture HSK Inc., il possède un toit rétractable géant de 2 100 mètres carrés pourvu d’une structure en acier légère qui génère des économies d’énergie non négligeables et appréciables…