BUREAUX DE LA MAISON RÉMY MARTIN, MERPINS
Le culte de l’exception durable
Créée en 1724, la Maison Rémy Martin a su demeurer une entreprise familiale. Initié il y a quatre ans, le projet « Assemblage » consistait à transférer son centre administratif de Cognac à sa périphérie pour l’insérer entre ses chais et son usine d’embouteillage. Légèreté, luminosité, durabilité et flexibilité architecturales ont milité en faveur d’une structure acier.
ABBAYE INDUSTRIEUSE
Spécialisée dans la mise en valeur de projets exceptionnels sur des sites remarquables, l’agence d’architecture Inca s’attaque ici à une institution patrimoniale d’un autre genre, le siège administratif d’une maison de Cognac presque tricentenaire. Selon les architectes, « le projet s’est ainsi voulu un écrin hébergeant les différents services administratifs de la société Rémy Martin, conçu avec une recherche constante de qualité et de pérennité constructive, reflet d’une volonté de construire avec une composante patrimoniale forte, à l’image et en écho aux chais de vieillissement situés à proximité ». Le site imparti – un grand parking goudronné aux allures de tarmac – était d’autant plus ingrat qu’il jouxte un site Seveso de niveau 2. Les deux unités voisines contrastent par leur temporalité et flux. Carrossée de métal, l’usine d’embouteillage cadence la phase finale de la production en un concert sonore et le ballet soutenu de flacons, chariots et camions, tandis que, dans les chais – tuiles canal et pierre de Charente noircie par le Torula compniacensis, un champignon microscopique se nourrissant des vapeurs d’alcool –, Grande Champagne et Fine Champagne vieillissent dans la semi-obscurité, avec lenteur et silence. Pour Gilles Marty, le fondateur d’Inca, « le sens de construire, c’est de construire du sens ». Convaincu, comme le paysagiste Gilles Clément, qu’il faut donner à la nature plus que ce qu’on lui prend, il lui importe non seulement d’implanter ses architectures dans du vivant, ici, un parc créé de toute pièce, mais aussi de l’inclure via trois cours de plus en plus privées : un parvis semi-ouvert, un « cloître » central et un jardin clos. Ils sont bordés au nord et au sud par deux grands bâtiments rectilignes parallèles de 100 et 110 m linéaires à la typologie et aux proportions inspirées des chais voisins. Comme ces derniers souvent surélevés en partie centrale pour accueillir des alambics de plus en plus grands, le profil de leurs façades orientales et occidentales évoque d’autant plus les frontons d’églises romanes – la Saintonge n’est pas loin – que chacune enchâsse un bow-window couronné en clocheton !
GALERIES DES OFFICES
Reliées par deux « barreaux-passerelles » hébergeant l’accueil et une aire de détente avec bar, les deux ailes abritent sur deux niveaux les espaces mutualisés au sud et les bureaux des différents services au nord. Une fine charpente métallique libère au maximum les plateaux (anticipant de futurs réaménagements) et les façades afin que tous les postes de travail et les circulations soient en premier jour, les grands débords de toiture et les protections et facteurs solaires des généreux verres clairs préservant les 130 occupants des ardeurs estivales du soleil. Au rez-de-chaussée, des coques béton préfabriquées à angles arrondis constituent des trumeaux intégrant les poteaux acier périmétriques de l’ossature, l’isolation thermique avec parement extérieur en moellons de calcaire de Gironde encore tout blonds. À l’étage, passerelles et circulations instituent un bien agréable promenoir autour des cours. Gilles Marty aspirait à devenir luthier, rien d’étonnant alors à ce que ses architectures s’accordent si bien avec leur contexte !
- Maître d’ouvrage : Rémy Martin
- Architectes : Inca Architectes ; AIA Ingénierie
- Charpente métallique : DL Atlantique
- Photographe : Franck Brouillet