Architectures
Immeuble Familistère, Montreuil
Tendue en miroir, une peau d’acier inoxydable nervurée reflète le ciel et éclaire la rue pour glisser le volume de l’immeuble dans son environnement.
Implantation à Montreuil en trois temps et trois bâtiments pour l’agence “archi5”. Les cinq architectes associés ont commencé en installant leur agence dans un ancien local industriel perpendiculaire à la rue Voltaire. Puis ils ont exploité les possibilités du plan local d’urbanisme en érigeant sur la rue un petit immeuble de bureaux venant coiffer l’entrée de leur local. Edifié en pont au-dessus d’un lieu en activité, cet immeuble est logiquement construit en structure métallique, de manière ostensible, avec quatre étages en encorbellement sur l’arrière. Par la suite, la parcelle voisine sur la rue venant à la vente, ils s’en sont portés acquéreurs pour y construire leurs propres logements sur le mode participatif de l’autogestion, les associés cumulant les rôles de maître d’ouvrage et de maître d’oeuvre. Une décision évidente au regard de leur pratique professionnelle, ce qui n’empêchera pas l’opération d’être longue à monter et difficile à mener.
Un volume construit au maximum des gabarits
La taille même de la parcelle et sa forme trapézoïdale constituent un défi : 207 m2 tout compté ! Si le règlement d’urbanisme autorise de construire le triple de surface et de monter sur sept étages, le milieu environnant constitué d’un habitat disparate de faible densité appelle quelques égards et requiert du doigté, ne serait-ce que pour désamorcer les recours en justice désormais monnaie courante à Paris, au propre comme au figuré. Combinée à l’obligation d’intégrer des places de parking, cette emprise réduite s’est traduite par l’installation d’un ascenseur à voiture pour desservir les 6 places en sous-sol. Un surcoût dont les associés se seraient bien passés… Sur cette base contrainte, la construction est érigée de manière traditionnelle en béton armé, mais en limitant les voiles aux façades et à la cage d’escalier-ascenseur afin de générer des plans libres. Les deux premiers niveaux accueillent des locaux d’activité en prise sur la rue et le deuxième étage des appartements locatifs, les associés se partageant les étages supérieurs. Les contraintes d’urbanisme imposant un retrait aux étages élevés, des appartements en duplex occupent le haut de l’immeuble, surmontés d’une ultime terrasse en nid d’aigle. Les voiles inclinés des façades et la forme pincée du plan leur confèrent des volumes expressifs quand les étages inférieurs privilégient des plans fluides et sereins. A chacun selon son goût et ses besoins !
Une vêture miroir pour effacer la masse
Restait à glisser dans son environnement cette construction portée au maximum des possibilités réglementaires,non seulement par souci de conformité mais encore par égard pour le voisinage. La volonté architecturale fut donc d’atténuer l’impact visuel du bâtiment en le profilant et en l’habillant d’une vêture adéquate. Malgré sa taille, il épouse le site par ses alignements et gagne le ciel par des façades inclinées sur les niveaux supérieurs. Ces faces furtives revêtent un traitement abstrait sous une enveloppe continue d’acier inoxydable qui passe des façades aux toitures par des plis à peine marqués. Encadrées de tableaux saillants de couleur anthracite, les baies vitrées découpent ces plans avec précision et régularité sans complaisance anecdotique. La peau d’inox fait descendre la lumière dans la rue et la renvoie aux immeubles voisins pour faire oublier le gabarit de la construction. Elle prend la couleur du ciel et change avec lui en reflétant les arbres de la rue au gré des saisons. Doux et légèrement flou, son aspect miroitant tient au brillant de la tôle et aux nervures qu’elle adopte : une onde spécialement créée à partir d’un profil standard dont le pas a été espacé. La finition brillante de la tôle a été réalisée sur une nuance d’acier inoxydable ferritique qui présente l’avantage de ne pas contenir de nickel et donc d’être affranchie des variations de cours de ce métal. Le calepinage des façades est fonction des mesures des tôles qui sont par ailleurs posées sur une ossature en recouvrement de l’isolation extérieure et fixées par des vis à six pans apparentes également en inox. Lumineuse et pérenne, cette vêture miroir est une politesse faite au voisinage et à la ville.
Maîtrise d’ouvrage : SCI Familistère
Maîtrise d’œuvre : archi5 (Jacques Sebbag, Laurent Boudrillet,
Anne Pezzoni, Thomas Dryjski et Bernard
Guillien, architectes associés)
Bureau d’études : Facéa
Entreprise gros œuvre : ECD
Entreprise bardage étanchéité : Balas
Menuiseries extérieures : Chosset et Luchessa
Bardage inox : “Arguin” d’ArcelorMittal en “Uginox Bright”
d’Aperam, nuance K36